2008/12/17

Pour Le Monde, un seul Irakien — qui serait par ailleurs pro-Saddam — devient symbole de ses 30 millions de concitoyens

Au printemps 2003, en signe de vengeance et de mépris, les Irakiens frappaient de leurs chaussures les statues monumentales de Saddam Hussein jetées à terre par les troupes américaines. Cinq ans plus tard, ils les jettent à la figure du chef de la coalition venue les libérer d'une sanglante dictature, en le traitant de "chien".
Voilà ce que nous apprend (sic) Le Monde! A moins que j'ai mal vu les images de la télé, ce ne sont pas 30 millions d'Irakiens (!) mais… un seul (!) qui s'est mué en lanceur de godasses.

Dominique Dhombres renchérit en affirmant — in so many words (et à la grande joie des lecteurs du Monde) — que le mot de la fin de la guerre d'Irak, ce n'est autre que
ce lancer de chaussures à Bagdad.
Le Monde (et ses lecteurs) ignorent allègrement 1) les condamnations du geste par de nombreux Irakiens, tout comme ils ignorent allègrement 2) que si un journaliste avait été l'auteur d'un geste similaire contre Saddam Hussein (ou contre, mettons, Assad ou contre les Mollahs, pays dans lesquels ce geste a été loué "spontanément"), il aurait eu (au minimum) les bras arrachés.

Comme le dit Gateway Pundit : "Funny. This never happened at a Saddam palace before?" The reporter "did not have his tongue cut out, did not have his arms broke and was not thrown off a roof. Now that's success." Gateway Pundit ajoute : "Of course, we have an idea what al-Zaidi would be going through right now if he were held in an Egyptian prison."

Enfin, 3) tant Le Monde que ses lecteurs présentent (à travers leur correspondante, Mouna Naïm) Mountazer Al-Zaïdi comme un Irakien type, alors que jamais, ô grand jamais, il n'aurait jeté une chaussure ou quoi que ce soit sur Saddam Hussein, vu que le dictateur était son héros et que — justement — le journaliste de Al-Baghdadiya travaille pour une télévision pro-saddamite ; sa "protestation" tient donc à peu près autant du symbolique que si, après le printemps 1945, un journaliste allemand, de tendance nazie, avait jeté ses bottes sur Franklin Delano Roosevelt ou Churchill pour tous les morts que les Américains et/ou les Anglais — et non Adolf Hitler — avaient causé durant la 2nde Guerre Mondiale.

Update: Ralph Peters agrees…

2008/12/16

A priori réducteurs : Siffler la Marseillaise, faire des attentats, sont les produits d'un défi politique et non pas d'une exclusion sociale

Siffler la Marseillaise, faire des attentats, sont les produits d'un défi politique et non pas d'une exclusion sociale. Pourtant, l'on exclut souvent la question, comme l'on confond affairisme, appât du gain et économie de marché ; autant d'a priori réducteurs sur les aspirations de la condition humaine en matière de liens forts entre liberté et justice, c'est-à-dire entre le politique et la politique. L'ouvrage de Lucien Oulahbib analyse ces impensés et fait des propositions sur ces questions si cruciales.

2008/12/15

"Le danger est que les Russes ne se font pas à l'idée que nous n'appartenons plus à leur empire ; Pour eux, tout doit se faire avec leur permission"

Dans un article sur le ministre tchèque des affaires étrangères, Karel Schwarzenberg (ou elle semble essayer de poursuivre l'habitude, bien française, de caricacaturer toute personne de tendance capitaliste, cf, de décrire Vaclav Klaus avec le plus de mots à tendance négative, c'est-à-dire comme un "président atrabilaire, colérique, ultralibéral et europhobe"), Marion Van Renterghem réussit pourtant à décrire la vue tchèque du communisme comme des relations avec les anciens maîtres russes. Après son retour de l'Autriche à la suite de la révolution du velours, Karel Schwarzenberg
parcourait le pays les week-ends pour essayer de le comprendre. Un lundi, il a confié au président son état de déprime après une incursion dans le nord du pays : bâtiments délabrés, églises effondrées, paysages dévastés. « Le président [Vaclav Havel] m'a dit : «Ecoute : tu reviens d'un pays riche. Tous ces problèmes environnementaux, nous saurons les résoudre un jour. Mais la catastrophe qui a miné le fond de nos âmes, nous mettrons très longtemps à nous en remettre.» Il avait raison. Les dégâts humains du communisme, c'est impossible à expliquer. C'est comme décrire à un Congolais une tempête de neige. »

Il a tiré de cette expérience, comme Vaclav Havel, une méfiance identitaire envers les Russes et un lien viscéral avec les Etats-Unis. Il a pris position pour la guerre américaine de 2003 en Irak. Et défend mordicus, contre les Verts qui l'ont nommé ministre, et contre la majorité de la population, le projet de radar antimissile américain sur le sol tchèque. D'abord par constat des insuffisances de l'Europe de la défense et de la nécessité des liens transatlantiques pour assurer la sécurité. Et, surtout, pour tenir tête à la Russie, qui considère le radar comme un affront personnel. « Les Russes ont prouvé leur sens de la responsabilité. Le danger ne vient pas de leurs armes. Le danger est que les Russes ne se font pas à l'idée que nous n'appartenons plus à leur empire. Pour eux, tout doit se faire avec leur permission. «This is not a soviet territory !» Il faut sans cesse le leur rappeler. »

2008/12/06

Typique : Pour un Français, la Géorgie était le chasseur, tandis que la Russie (?!) était le lapin (?!)

Le véritable moyen de juger de la légitimité des actions menées par la Russie n'est pas de se demander si le gouvernement démocratiquement élu de la Géorgie est venu à la rescousse de son peuple, sur son propre territoire, mais plutôt de répondre aux questions suivantes. Est-ce la Géorgie ou est-ce la Russie qui a : recherché une annexion de facto du territoire souverain d'un état voisin; délivré illégalement des passeports aux résidents d'une démocratie voisine afin de créer un prétexte à l'invasion; envoyé des centaines de chars et des milliers de soldats au-delà des frontières internationalement reconnues d'une démocratie voisine; été l'instigatrice d'une série de provocations mortelles et d'attaques ouvertes pendant de nombreux mois ayant entraîné la mort de nombreux civils ?
Georgian President Mikheïl Saakachvili answers his detractors (on the same page appears a sort of reply by Frank-Walter Steinmeier), stating that Moscow's campaign to convince the world that Tbilisi acted in an irresponsible manner during Russia's August invasion has manifestly borne fruit.
A en juger par la couverture médiatique récente, cette campagne a été un succès.
This is proven by the vast majority of Le Monde readers, who show that the French still like to listen to the Kremlin as the readers tell Le Monde to stop letting people like Mikheïl Saakachvili have a tribune (regulating speech they do not like, i.e., that does not square with la pensée unique).

The readers fume with scorn, calling the Georgian president an "irresponsible person", a "fantoche", an "agent of the CIA", somebody "filled with contradictions and imprecision", with "a degree zero in idiocy", a "hunter" who accuses the "rabbit" (Russia!!) of having started the conflict, and "un branquignol mégalomane et incontrôlable qui trouvera toujours normal de visiter une usine de fusées avec des briquets plein les poches". "J'allucine de voir des articles comme celui-ci dans le Monde" adds another reader, while another likens Le Monde to the ordinary Russian propagandist using the same Putin methods so often decried. "Le 'Monde' s'honorerait en ne lui [Mikheïl Saakachvili] servant pas de relai !"

To remember one definition of the danger of a one-party state: "contrary voices are regulated, barred, banned when possible, mocked and marginalized when not." There is only one truth: "Mais les faits sont têtus et ils s'imposent. L'agresseur fut la Géorgie! Pourquoi Le Monde insiste encore?" So keep quiet, nom de Dieu! And in case you don't understand that, get this: "La Géorgie, qui a été libérée de l'empire Ottoman par les Russes fait partie de l'ensemble russe !" So, enough already!

Thank goodness for people like Georges GIEN who says:
Les propagandistes zélés de l'ambassade russe sont en service commandé. Il est amusant d'ailleurs de constater, que les critiques portent uniquement sur l'homme, (comme à l'époque soviétique) que l'on présente comme un malade ou un fou...
Georges GIEN also answers Frank-Walter Steinmeier's column on the same page of Le Monde:
Et bla, bla, bli et bla, bla, bla. C'est creux et sans intérêt. Car pour espérer être crédible il ne faut pas accepter que la Russie envahisse et occupe un pays, membre de l'Onu, dont les frontières sont internationalement reconnues. reprendre les discussions avec la Russie, sans poser au préalable l'arrêt de l'occupation en Géorgie est inadmissible. Voulez-vous aussi, comme Schroeder devenir administrateur chez gazprom ?

2008/12/04

La Chine considère la France comme un pays femelle, un pays vassal, et le maillon faible de l'Europe

Les diplomates français ont de tout temps été fascinés par la Chine et en ont une vision totalement déconnectée de la réalité
dit un spécialiste de la Chine, Jean-Vincent Brisset, directeur de recherche à l'Institut de relations internationales et stratégiques, à Soren Seelow (Nee hau à José).
Nous sommes persuadés qu'il faut être gentils avec les Chinois pour que les Chinois soient gentils en échange. Parmi les pays ayant joué un grand rôle au niveau mondial, le nôtre est celui qui s'est montré le plus faible vis-à-vis de la Chine. Nous sommes ainsi considérés comme un pays femelle, faible et qui change tout le temps d'avis. Or la Chine ne respecte que la force.

…Pour [les Chinois], c'est extrêmement clair : la France est un pays vassal. … Nous n'y avons gagné que du mépris. … Il y a heureusement beaucoup de gens en Europe qui commencent à comprendre que la Chine n'est pas un pays ami. C'est un pays égoïste qui a des rapports rugueux avec le reste du monde, avec lequel il faut prendre un peu de distance.

… Si l'Europe faiblit, la Chine pourra piétiner tous les pays européens l'un après l'autre, sauf la Grande-Bretagne, qui ne se laissera jamais faire.

Un Vénézuélien dont le prénom est Hitler ? Un Français est choqué ; un Vénézuélien dont le prénom est Staline ? Le Français trouve ça sympa

In Le Monde, Jean-Pierre Langellier has an article about the strange and funny first names that Venezuelans give their children.

There is Jefferson, Eisenhower, Kennedy, Nixon, Elvis, John Wayne, Usnavi, and, in the oil-producing region of Maracaibo, there are even kids (since grown up) named General Electric, Max Donald, and Made in USA. Along with Danger as well as Yesaidu and Juan Jondre, local adaptations of "Yes, I do" and "One hundred".

So far, so good. But here is where the French particularity comes out. Jean-Pierre Langellier points out there are some names of dubious taste, such as Iroshima Jennifer Bravo Queredo and Hitler Eufemio Sanchez Mayora, Jr, son of Hitler Eufemio Sanchez Mayora, Sr, and one of 60 people in the country with the first name Hitler.

The problem is whom the Frenchman did not include in the dubious name category. Indeed, see how the entire article started:
Lenin Danieri travaille comme reporter pour une chaîne de télévision vénézuélienne. Stalin Gonzalez, ex-leader étudiant, vient d'être battu aux élections municipales. Hochiminh Jesus Delgado Sierra dirige une entreprise à Barquisimento, une capitale provinciale. Mao Pinto est publicitaire.
Having Hitler for a first name is dubious (as we can all agree), but, obviously, for a Frenchman like Jean-Pierre Langellier, having Lenin, Stalin, Mao, Hochiminh, or Chegueva as a first name is not, and is obviously nothing less than as cute as Jefferson or Kennedy. In the country where, we are told, it is not at all true that people regret the Soviet era, note that (at the time of this writing) no reader has come forward to protest (or even offer a comment).

(True, Jean-Pierre Langellier goes on to bemoan the "sad" example of Carlos the Jackel, but that seems to be because the terrorist born Ilich Ramirez Sanchez (his brothers were named Lenin and Vladimir) brings disfavor to Lenin's (original first) name, not because Lenin's name brings disrepute to the terrorist.)

2008/12/02

"Je ne peux pas faire 200 mètres dans" les rue de Saint-Pétersbourg, dit un Africain, "sans me faire pointer du doigt"

Hamidou Bakayoko … est malien et vit depuis vingt-six ans à Saint-Pétersbourg. Agé de 46 ans, il est marié à une Russe, ils ont un enfant. Il est mordu de foot, mais ne mettra jamais les pieds au stade. Plombier dans le quartier de Petrogradskaya, il grille cigarette sur cigarette dans son atelier vétuste en méditant sur son sort : "La Russie, c'est pas un pays pour les Noirs. Le racisme, c'est la maladie principale ici. Je ne peux pas faire 200 mètres dans la rue sans me faire pointer du doigt."

Il met son manteau, allume une énième cigarette, et c'est parti pour une promenade. Deux cents mètres plus loin, une femme, la quarantaine, sourire moqueur, montre du doigt Hamidou à ses deux amis. "Comme un animal, souffle-t-il. Et encore, on ne m'a pas demandé si je me suis lavé aujourd'hui."
While all eyes are eternally on America on outlook for instances of racism, intolerance, stupidity, and other "crimes" against humanity, other societies, such as Russia, with far worse "sins", only get passing interest in the media.
Pour accueillir les joueurs de l'OM, surtout les Noirs, des "ultras" se sont recouverts le visage de la fameuse cagoule blanche du Ku Klux Klan, ont imité des cris de singe, lancé des bananes. Dans une tribune, un singe en peluche portant le maillot marseillais a été pendu au bout d'une corde. "C'était amusant, lance Dmitri, 22 ans, un fan du Zénith qui dit appartenir à un groupe de supporteurs, les Members, proche des mouvements néonazis. C'est important de montrer aux nègres qu'ils sont des nègres. Nous sommes des patriotes de la ville, la place des Noirs n'est pas chez nous, mais dans les arbres en Afrique."
Needless to say, a number of Le Monde readers look back at Soviet times with nostalgia.

2008/11/21

Au Moyen-Orient, le soldat américain est un beau soldat, digne héritier de ceux qui libérèrent la France et l’Europe

Qui sont-ils, ces soldats d’outre Atlantique, quel est leur quotidien et quel soutien apportent-ils quotidiennement à nos hommes des OMLT ?
demande Merlin, soldat français en Afghanistan dans une observation personnelle et "from the field" qui contredit quelque peu les descriptions superlatives, apocalyptiques, et hystériques de la presse de l'Hexagone (la guerre est un "désastre", le soldat américain "a peur", la "tragédie" du quotidien) depuis le confort de leurs bureaux à Paris.
…quels soldats ! Nous n’en avons pas croisé de mauvais. Etrange quand on sait combien nous savons être critiques !

Et au combat me direz-vous ? Si vous avez vu RAMBO vous avez tout vu : toujours présents pour se porter à la rescousse quand une de nos équipes se trouve dans le pétrin, et toujours dans des délais très brefs. C’est un de leur secret : ils passent de la tenue claquette T-shirt à la tenue de combat en trois minutes, et arrivés à proximité de la position ennemie leur mode d’action est simple et déroutant : ils foncent !

…Ici, rarement un mot plus haut que l’autre, et dès 5 heures du matin les travaux d’intérêts généraux se font dans le plus bel ordre et sans jamais rechigner. Bref, de ce qui nous a été donné de voir, de l’hélicoptère de passage qui s’arrête à côté d’un véhicule en panne pour savoir si tout va bien aux sections de combat qui se portent en appui des nôtres avant même de savoir si la mission est périlleuse, le soldat américain est un beau soldat, digne héritier de ceux qui libérèrent la France et l’Europe.

2008/11/20

Espoir déçu : Un clone de plus

Il est possible, insiste Stéphane, "même pour moi", d'avoir une conversation courtoise et mesurée avec de parfaits inconnus sur les élections américaines.
Ce n'est pas si difficile. En Europe, grâce au merveilleux travail de la presse, les gens ne connaissent rien de John McCain. Quant à Obama, on n'en sait rien non plus sinon qu'il est génial et qu'il sauvera le monde. On peut ne pas être d'accord mais il reste possible de gloser sur des sujets connexes: la nouveauté historique de l'élection d'un homme de couleur au poste de Président, le renouveau du Parti Démocrate, le fort taux de participation...

Pas pour Gilles [le nouveau membre dans l'équipe de Stéphane pendant son premier déjeuner de la boîte dans une tablée de huit].

Le marronnier Obama est à peine sur la place que Gilles commence, avec un rictus, à dénigrer ces "salauds" d'Américains. Tous. Obama ou un martien, peu importe, qu'ils aillent au diable. "Quand on voit tout ce qu'ils ont fait en Amérique du Sud..." lance-t-il d'un air entendu (amenant des hochements de tête d'approbation.)

Peut-être que l'intégration dans l'équipe est réussie, finalement. Haut la main.

Je mâchonne en silence. J'avais, comme tous les prisonniers en terre ennemie, l'espoir qu'un changement ne pourrait amener qu'une amélioration. Espoir déçu. Un clone de plus. A partir de cette réplique, je me contente de la boucler. Cela ne sert à rien de discuter: je connais le bestiau. Je peux finir ses phrases — et je m'amuse à le faire en pensées sur ses répliques suivantes.

Une anecdote de peu d'importance, je l'admets. Mais creusons un peu. Dans quel milieu, dans quelle société saine un nouveau venu peut-il sceller une amitié de connivence avec de parfaits inconnus en répandant sa haine sur un peuple du monde? Si Gilles avait dénigré ses salauds d'Ouzbeks ou ces chiens d'Ukrainiens, cela aurait levé quelques sourcils. Mêmes pour d'autres peuples plus dominateurs, comme les Chinois, par exemple. Et s'il avait craché sa haine des Juifs, il aurait pu craindre une mise à pied instantanée et des poursuites pénales.

Mais en Suisse — et, je suis prêt à le parier, dans une bonne partie de l'Europe — en 2008, pour s'intégrer, il faut être anti-américain.

2008/11/13

L'Amérique et l'esclavage

Dans Le Monde, Corine Lesnes nous parle d'histoire refoulée en déplorant que
la contribution des esclaves à la construction du pays n'avait jamais fait l'objet d'une reconnaissance historique, d'excuses nationales, ne parlons pas de réparations.
Des réparations?! Au nom de quoi, précisément?!

Je souhaiterais savoir au nom de qui exactement le gouvernement américain devrait s'excuser pour l'esclavage ou payer des réparations. Comme la majorité de la population américaine aujourd'hui, je suis le descendant d'immigrés qui sont arrivés aux États-Unis après le tournant du XXe siècle et les ancêtres de la plupart des Américains n'ont par conséquent rien à voir avec le traitement des Noirs sur les plantations — pas plus que celui des Indiens sur les plaines. (Quoique cela ne fait pas d'eux d'agneaux innocents ; nos ancêtres d'Europe ou d'ailleurs ont bien dû prendre part, pour certains d'entre eux au moins, dans les épisodes déplorables de l'Histoire de leurs propres pays, même si ce type d'événement historique n'a pas été traité par les divers cinémas nationaux avec le même appétit que celui dont fait preuve Hollywood pour les sujets sensibles de l'Amérique).

Quant aux Américains du temps de l'esclavage, deux fois plus de Blancs vivaient dans les États du Nord, où l'esclavage était illégal et où il avait été aboli, dans la plupart de ces États, avant la Révolution Française. Washington devrait-il s'excuser pour le compte du Sud, alors? Là aussi, la plupart des Blancs — deux tiers, pour être exact — ne possédaient pas un seul esclave. (On remarque par ailleurs une consonance étrangement familière dans les justifications des esclavagistes de l'époque : "Nous on s'occupe de nos Noirs du berceau à la mort" disait un Sudiste à un Nordiste, "tandis que chez vous les Yankees, vos travailleurs «libres» ont la liberté de créver.")

En outre, autant d'Américains — pour la vaste majorité, des Blancs — ont été tués pendant la Guerre de Sécession (qui mit fin à l'esclavage) que pendant toutes les guerres du XXe siècle réunies ; n'est-ce pas un prix suffisamment élévé pour le péché de l'esclavage?

Peut-être Washington devrait-il quand même s'excuser, ou payer des réparations, pour les planteurs et les esclavagistes du Sud? Mais ceux-ci ont hérité de ce système, et bien qu'ils n'aient rien fait pour s'en débarrasser — ils ont même commencé une guerre civile pour le sauvegarder —, en quoi sont-ils plus coupables que les Anglais, Français, Espagnols, Portugais, Hollandais, et autres qui ont expédié les Noirs dans leurs colonies (parmi lesquelles, bien entendu, les futurs États-Unis) et dont la seule raison pour ne pas avoir introduit l'esclavage noire sur le continent européen (ainsi que dans le Nord des futurs USA) était l'absence d'un climat propice?

Enfin, en quoi tous les Blancs sus-nommés sont-ils plus coupables que les Africains dont les guerriers sont partis à la conquête des tribus voisins afin de vendre leurs ennemis aux Européens?

Le Monde, Septembre 2001

2008/11/06

A cet instant -mais pour combien de temps?-, nous pouvons dire, avec beaucoup plus de conviction que le 11 septembre 2001: nous sommes tous américains

In a In a Le Monde piece entitled Sorry we can't — and half-written in English — Robert Solé says he can't write, because he is weeping for joy, all the while:
• informing us that Obama's election is nothing less than the "first worldwide good news since the fall of the Berlin Wall in 1989"
• basically admitting that the French did not really feel much empathy with America af ther the 9/11 murder of 3,000 citizens, and
• stating that today, because of the election results, "we [truly] are all Americans" but immediately casting doubt onto how long he thinks that will last…
Sorry. No column today. The keyboard is not responding. History is a page being turned. Three words on the screen: "Yes we can." While it is impossible to joke with genocide or disaster, it is equally impossible to joke with an event that makes you weep for joy. The first worldwide good news since the fall of the Berlin Wall in 1989 needs more than a pirouette or an amused wink. At this moment - but for how long ? - we can say with far more conviction than on 11 September 2001 : we are all Americans.

(Désolé. Pas de billet aujourd'hui. Le clavier ne répond pas. L'Histoire est une page qui se tourne. Trois mots sur l'écran : "Oui, nous le pouvons." S'il est impossible de plaisanter avec un génocide ou une catastrophe, il est tout aussi impossible de plaisanter avec un événement qui vous arrache des larmes. La première bonne nouvelle planétaire depuis la chute du mur de Berlin en 1989 appelle autre chose qu'une pirouette ou un clin d'oeil amusé. A cet instant - mais pour combien de temps ? -, nous pouvons dire, avec beaucoup plus de conviction que le 11 septembre 2001 : nous sommes tous américains.)

2008/11/05

The President-Elect Metamorphosing From a Black Man Into a Man of Mixed Blood

Barack Obama remporte l'élection présidentielle américaine

Selon les estimations d'Associated Press, le démocrate est désormais assuré de l'emporter face au républicain John McCain. Il devient ainsi le premier Noir élu président des Etats-Unis.
Besides some dubious humor, the language was changing within minutes… It's no longer "un (homme) noir" who has won the White House, according to Le Monde's email service, but "un métis". (That way, the path is open for charges of anti-"black" racism to be levelled at (white) Americans in the future…)
Barack Obama entre dans l'histoire américaine
Le candidat démocrate, 47 ans, sera le 44e président des Etats-Unis. Pour la première fois, un métis va diriger les Etats-Unis, tout en bénéficiant d'une forte légitimité en raison d'un taux de participation très élevé. "Il en a fallu du temps, a déclaré Barack Obama devant une foule en liesse de 65 000 personnes à Chicago. Mais ce soir, grâce à ce que nous avons accompli aujourd'hui et pendant cette élection, en ce moment historique, le changement est arrivé en Amérique." Les électeurs votaient également pour renouveler un tiers du Sénat et les 435 représentants de la Chambre. Les démocrates ont renforcé leur majorité, gagnant 5 sièges au Sénat et obtenant plus de 60 % des sièges à la Chambre. Ce qui aidera M. Obama à faire passer ses réformes.
Am I wrong to point out that I predicted this in my post on racism?
…the bean-counters, the snickerers and the snorters … will say that oh, sure there is an African-Americans (there are African-Americans) whom Americans have elected president, but… his (but their) skin color wasn't dark enough. "Would they ever" — insert knowing ironic smile here — "elect a really dark Negro?"

2008/10/16

"Pourquoi je suis un Républicain conservateur…"

Tandis que Orlando Patterson explique dans Le Monde que "l'Amérique est peut-être la nation la moins raciste des pays développés" et même qu'il existe "une classe moyenne noire qui, en termes d'influence sociale et d'accès aux pouvoirs, possède un poids parfois disproportionné par rapport à sa réalité numérique", voici un Noir américain que les Français ne comprendront jamais… (De fait, voici un Noir américain dont les Français ne soupçonnent même pas l'existence…)

2008/10/07

Giscard faisait confiance à Brejnev et ne pensait pas que l'URSS fût animée d'une volonté d'expansion

Un article de Condoleezza Rice prône L'unité transatlantique face à Moscou. En se basant sur les précédents articles du Monde sur l'invasion de la Géorgie, pourtant, on peut deviner que dans leurs commentaires et réactions, les lecteurs du quotidien ont dû déverser un torrent d'invectives et de bile sur Washington et les Américains, tout en montrant une capacité étonnante de vouloir excuser les Russes (ces malheureux), en voulant "comprendre" leurs raisons et sympathiser avec leurs excuses.

En effet, Dominique David répond à Yuriy Kochubey (ambassadeur d'Ukraine) avec moult sympathie pour les Russes, tout en fustigeant ou déplorant "l'aventurisme géorgien", "la myopie néo-américaine", les "hautaines leçons américaines", et les "provocations américaines tous azimuts". En d'autres mots, tout — tout dans cette conte de fées — est la faute des méchants Yankees.
C'est surtout aux Etats-Unis que se sont développées ces stratégies aventuristes, programmant et organisant la faiblesse russe. … Les Etats-Unis ne comprennent pas grand-chose à la Russie ; leur politique vis-à-vis de Moscou est à la fois incohérente et pousse-au-crime.
On comprendra que les Européens, eux — ces êtres éminemment lucides et nuancés — les comprennent parfaitement, les Russes. Et ça ne date pas d'hier. Les Mémoires de Jean François-Poncet viennent à point lorsqu'il, alors le ministre des affaires étrangères, évoque la politique soviétique du chef de l'Etat après l'invasion de l'Afghanistan. Valéry Giscard d'Estaing,
explique-t-il, croyait à la vertu des relations personnelles entre hauts dirigeants. Il faisait confiance à Brejnev et ne pensait pas que l'URSS fût animée d'une volonté d'expansion. Le 19 mai 1980, en ayant mis seulement quelques personnes dans la confidence - même l'ambassadeur de France à Moscou est tenu à l'écart -, il va à Varsovie rencontrer Brejnev, qui lui fait miroiter un retrait des forces soviétiques d'Afghanistan. Giscard relaiera la bonne, et fausse, nouvelle auprès de ses pairs occidentaux.

Jean François-Poncet l'admet : "En allant à Varsovie, nous donnions le sentiment de diviser l'Occident, donc de l'affaiblir, alors que le moment me paraissait venu d'afficher son unité et sa détermination." Au plan intérieur, Giscard livra des munitions à son adversaire socialiste : "Il est probable (que la rencontre de Varsovie) desservit le président", écrit-il avec le sens de la litote.

Quant à l'ambassadeur d'Ukraine, Yuriy Kochubey, il fustige cette tendance, au sein de la population française — celle des citoyens communs comme celle des élites et des faiseurs d'opinion — de prendre les déclarations (les légendes?) — par la plus grande des coïncidences, auto-congratulatoires — des "propagandistes moscovites" pour pain bénit.
…on ne saurait être d'accord avec [Michaël Prazan] sur le concept d' « intégrité territoriale » concernant l'Ukraine dont les frontières ont constamment fluctué. Mais quel Etat en Europe, y compris la France, peut se prévaloir de frontières « non fluctuantes » ? Il mentionne les « annexions soviétiques » entérinées à Yalta, concernant les frontières avec la Roumanie et la Pologne. Si l'auteur voulait être objectif, il aurait rappelé que tous ces territoires sont des terres peuplées par les Ukrainiens, bien qu'ayant, avec l'accord de l'Entente, été soumis à une occupation étrangère.

Passons à la Crimée qui, selon M. Prazan, vivrait tout entière dans la « nostalgie de l'URSS » et dont les habitants « dans leur immense majorité » considéreraient avec mépris la capitale ukrainienne, Kiev, et souhaiteraient que la Russie annexe la presqu'île. Il aurait fallu ici mentionner que la majorité de la population de la Crimée a voté pour l'indépendance de l'Ukraine en 1991. Mais l'auteur considère que sa tâche est « d'avertir » que la Crimée, si l'Ukraine est intégrée à l'UE, sera « au mieux le noeud inextricable d'une prochaine guerre froide, au pire le théâtre d'un conflit larvé avec lequel auront à se débattre les Européens ».

L'auteur passe à la Galicie qui « est quant à elle nostalgique de son alliance à l'occupant nazi ». Pour justifier ce propos, il … mentionne … la division SS Halytchyna, une formation composée de jeunes Ukrainiens qui voulaient se battre contre les bolcheviks et a, par la suite, été écrasée par l'armée soviétique. L'existence de la division SS Charlemagne en France ou l'Armée russe de libération du général Vlassov du côté nazi ne donne pas le droit de dire que les Français et les Russes ne partagent pas les valeurs européennes.

Enfin M. Prazan accuse pratiquement tous les Ukrainiens de crimes contre la population juive, comme si c'était les Ukrainiens qui avaient élaboré le plan de « la solution finale de la question juive ». … Mais à quelles données scientifiques et à quelles statistiques M. Prazan se réfère-t-il ? Il n'en cite aucune.

S'il fallait en croire M. Prazan, les lieux de mémoire de la tragédie du peuple juif n'ont été honorés que par les Soviétiques et par les organisations juives. Il accuse l'Ukraine également de falsification de l'histoire. Ce sujet figure également de manière obligatoire au menu quotidien des propagandistes moscovites, donc l'auteur l'a ajouté à son « plat ».

Le public européen, les lecteurs réfléchis et critiques, verront que cette tribune est une manipulation qui ne se base sur rien.

2008/09/27

Le service de contre-espionnage tchèque accuse les services secrets russes de financer les mouvements civiques et pacifistes du pays

Le Service de sécurité et de renseignement tchèque (BIS, contre-espionnage) accuse clairement … les services secrets russes de chercher activement à influencer l'opinion publique tchèque contre le futur déploiement du bouclier antimissile américain dans le pays
écrit Martin Plichta dans Le Monde, une accusation que nous semblons aussi avoir vu dans les réactions des "lecteurs" du quotidien de référence.
Tous les ans, le BIS met en garde contre les activités des agents russes présents dans le pays depuis plus de soixante ans. Le rapport 2008 est particulièrement clair et concret parce que "les activités d'espionnage russes en République tchèque atteignent actuellement une intensité particulièrement élevée". Selon le document disponible sur le site Internet du BIS, "l'objectif (des services russes) est, dans un contexte plus large, de créer, entre autres, l'impression qu'on assiste en Europe à une réhabilitation du nazisme et à une négation du rôle de l'URSS dans la défaite du nazisme, et ce sous le patronage de l'Union européenne et de l'OTAN". Le BIS fait aussi état d'un regain d'activités dans le domaine économique et met en garde contre la trop grande dépendance du pays envers les matières premières russes.

Déjà au printemps, le BIS avait laissé entendre dans le quotidien Lidové noviny, traditionnellement proche des services tchèques, que le mouvement civique "Non aux bases" (américaines) était financé par les services russes. Il avait en particulier pointé du doigt un entrepreneur tchèque qui avait sponsorisé le mouvement. Après enquête des médias indépendants, il s'est avéré que l'homme en question, a priori irréprochable et sans lien avec les milieux d'affaires russes ou les services de Moscou, avait le malheur de posséder une datcha... en Russie.

2008/09/21

En France, critiquer le racisme des autres, on sait faire, surtout s'il s'agit des Américains ; Mais balayer devant sa porte, c'est plus difficile

In an interview with Le Monde's Jean Birnbaum and Benoît Hopquin (who still can't spell the first name of Jesse Jackson), Louis-Georges Tin (Maître de conférences à l'IUFM d'Orléans, porte-parole du Conseil représentatif des associations noires (CRAN)) suggests that France loves blacks — when the blacks are American (i.e., foreign) blacks, that is, and a bit less when the blacks are French (domestic) blacks…
D'une manière générale, en France, on aime beaucoup les Noirs d'Amérique... Si vous prenez un discours de Barack Obama, de Martin Luther King ou de Jessie Jackson, et que vous le montrez à un Français, il le jugera formidable. Si vous lui dites qu'il a été prononcé par un Noir français, il vous dira : "Attention au communautarisme !" En France, critiquer le racisme des autres, on sait faire, surtout s'il s'agit des Américains. Mais balayer devant sa porte, c'est plus difficile.

2008/09/20

L'adversaire des Russes que nombre de Francais diabolisent comme une "marionnette", le "comique Docteur Folamour", ou "le perroquet du Caucase"

Le Monde's Piotr Smolar has an interview with Mikheïl Saakachvili. Needless to say, Le Monde's readers opine (sic) that Georgia's president is an American poodle; that he is a puppet; that he is "the Caucasian parrot"; that he is a liar; that he is dangerous; that he is a warmonger; that he is the equivalent of Dugashvili (Stalin); that he is unstable; that he suffers from mental trouble; and that he is a "comic Dr. Strangelove". That it is in Europe's interest that Russia remain a great power. And that "Medvedev et Poutine ne sont pas de vrais démocrates, mais eux, au moins, savent garder leur sang-froid !" All of which leads a rare reader (by the name of Raboliot) to state:
A lire les commentaires haineux à l'encontre de Saakachvili sur ce forum, je constate que le service communication de l'ambassade d'URSS, pardon de Russie, à mis ses plus brillants sujets derrière leur PC...C'est vrai que le problème d'une démocratie à leurs frontières est abominable et Annonciateur de catastrophes.. Il faut donc discréditer Saakachvili : C'est un suppôt des USA, un "cadavre politique" "un malade" on ressort les vieilles rengaines apprises dans les écoles du KGB.
Xavier adds that
J'ai l'impression de voir dans la plupart des commentaires postés ici qu'une mascarade de la propagande "soviétique". Le mieux pour ceux qui tentent de décrédibiliser la Géorgie étant tout simplement de faire passer son président pour fou, voire mieux de le traiter de "connard", on évite ainsi bien facilement le débat et la vérité qui se trame actuellement. Car qui est le plus fou des deux? celui qui recherche l'intégrité de son territoire ou bien celui qui l'étend?
While Ilias points out that
Être pro-Poutin par anti-américanisme aveugle c est comme être pro-Hitler par anti-anglisme a la question tchécoslovaque en 1938.

2008/09/19

Obama le Bon, McCain la Brute, et Bush le Truand

As they never tire telling us, the French are always masters of nuance as well as the champions in always finding just the exact literary simile that fits. This was proven again tonight, when France 2 (!) broadcast a news item (!) on political TV ads in America, comparing leading politicians to the characters of a… spaghetti western (!?!)

Using the emblematic characters of Sergio Leone's The Good, the Bad, and the Ugly, the entirely serious-minded (sic), profound (sic), and thoughtful (sic) news channel proceeds to tell viewers that political ads in America are misleading and even totally false, whether it's the ad of Obama — compared to The Good — depicting John McCain saying America's economy is sound or the ad of John McCain — compared to the Ugly — stating that Obama wanted sex ed in kindergarten before toddlers could even read…

Who, then, is the Bad — known in the French title as the Crook or the Gangster? (In French, as in Italian, the order of the title is The Good, the Ugly, the Bad.) France 2 (on whose website, incidentally, a poll shows 52% of respondents wanting French troops out of Afghanistan — as opposed to 40% in favor of them staying) mentions the Swift Boat ad of four years ago — "a total lie" against John Kerry — which allowed for the victory of… (you got it) the Crook

2008/09/10

Nous semblons avoir tout oublié: "Invoquer les frontières de l'URSS pour excuser aujourd'hui la politique de la Russie est une forme de négationnisme"

L'important, c'est ce que le conflit révèle à propos de la perception qu'a la Russie de sa place dans le monde moderne et de la manière dont elle entend entrer en interaction avec les autres membres de la communauté internationale
écrit l'ancien président polonais Aleksander Kwasniewski dans Le Monde.
Là repose le principal défi de politique étrangère. Quand Vladimir Poutine a décrit la chute de l'Union soviétique comme le « désastre géopolitique majeur du siècle dernier », il ne s'est pas seulement exprimé au nom d'une étroite caste de politiciens et de responsables de la sécurité au sommet de l'Etat russe. Il a formulé un sentiment de perte partagé par une large majorité de la population russe.

…L'Europe et les Etats-Unis devraient travailler à concrétiser ces espérances dans le cadre de frontières légitimes. Nous ne pouvons accepter le contre-argument souvent avancé dans les milieux russes, que le déclin de la Russie a été le résultat d'un plan occidental délibéré pour l'ébranler, et dont la compensation devrait à présent prendre la forme d'une complète remise à plat des accords postérieurs à la guerre froide. C'est cette mentalité qui a été la véritable cause du conflit en Géorgie.

Malheureusement, il semble que certains en Occident soient disposés à partager cette vision des choses et à soutenir que le processus d'intégration euro-atlantique est critiquable parce qu'il a empiété sur les intérêts légitimes de la Russie, provoquant ainsi sa réaction. Bien que personne ne propose de faire marche arrière, beaucoup de voix s'élèvent pour suggérer que ce processus devrait être interrompu et les limites orientales de l'Union européenne et de l'OTAN, figées dans le marbre. Nous devons être clairs. C'est l'Europe du congrès de Vienne de 1815 et de Yalta de 1945. C'est l'Europe des puissances et des sphères d'influence, des grandes puissances fixant le destin des petites nations d'un coup de stylo. C'est l'Europe que nous sommes supposés avoir laissée derrière nous.

L'expansion de l'OTAN et de l'Union européenne n'a pas été le résultat de quelque grand dessein impérial conçu à Washington et Bruxelles. Elle est issue d'abord et avant tout du désir des nouvelles démocraties indépendantes d'ancrer leurs efforts de réformes au sein d'institutions internationales fondées sur des valeurs démocratiques. Le désir d'adhésion des nations européennes encore laissées à l'écart de ces institutions obéit à la même motivation. Si nous leur fermons la porte, non seulement nous violerons le principe d'autodétermination supposé être la pierre angulaire de la nouvelle Europe, mais nous créerons aussi une zone d'incertitude géopolitique, et peut-être d'instabilité, à notre porte.

Bien entendu, il faut éviter les tensions inutiles avec la Russie. Mais nous devons aussi veiller à ce que les stratégies visant à résoudre les différends et à éviter les conflits n'envoient pas de signaux de faiblesse, en particulier à un moment où les interprétations triomphalistes du conflit en Géorgie menacent de nourrir les illusions nationalistes. De telles erreurs de communication peuvent aussi susciter des réponses agressives fondées sur une assurance excessive, et l'idée, fausse, selon laquelle des opportunités sont à saisir. Ceux qui pensent que mettre un terme à l'intégration euro-atlantique fournira de quoi réparer rapidement nos relations avec la Russie pourraient avoir une mauvaise surprise.

…Continuer à freiner les plans d'action pour l'intégration de l'Ukraine et de la Géorgie reviendrait à envoyer un signal totalement erroné : cela indiquerait l'acceptation tacite d'une division de l'Europe en sphères d'influence. Nous ne pouvons donner crédit à l'idée que la Russie bénéficie d'un statut prédominant qui mordrait sur les droits souverains de ses voisins. Ce fut le premier objectif du conflit russe contre la Géorgie et nous devons être fermes en le rejetant, en application d'un principe de politique européenne — si maladroit pour nos relations que cela puisse se révéler à court terme.

L'article de Thierry Wolton sur l'héritage communiste et soviétique couplé avec le négationnisme qui règne en France et en Occident — négationnisme aussitôt confirmé par les… lecteurs du Monde ! (voir trois exemples ci-bas) — mérite aussi d'être cité (ce qui est souligné l'est par moi) :

…La plupart des analyses et commentaires consacrés à la crise russo-géorgienne passent sous silence l'héritage communiste qu'elle révèle. La chute de l'URSS date d'un peu moins de deux décennies, mais nous semblons avoir tout oublié. Or, il est difficile de comprendre ce qui se passe dans le Caucase sans intégrer cet héritage.

Nombre de bons esprits justifient la politique actuelle de la Russie en invoquant la continuité avec l'Union soviétique tout en négligeant la dimension communiste de ce que fut cette entité. On nous assène comme une évidence que Moscou veut simplement retrouver les frontières de l'URSS comme si celles-ci lui appartenaient de droit. Drôle de conception de l'histoire.

L'URSS s'est construite dans le feu et le sang, par l'écrasement des peuples du Caucase et d'autres encore, à l'ouest, au nord de ses frontières. Elle s'est consolidée par la mise en coupe réglée des peuples qui occupaient ces régions, à qui fut imposé le système communiste. Des centaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants ont été assassinés ou déportés massivement, payant de leur vie cet impérialisme. Invoquer les frontières de l'URSS pour excuser aujourd'hui la politique de la Russie est une forme de négationnisme lorsqu'on oublie le drame de cette histoire.

Pourquoi escamoter ce passé quand les dirigeants russes en sont imprégnés ? C'est le précédent soviétique qu'ils ont en tête quand ils revendiquent de nouveaux droits impériaux. Vladimir Poutine, dont nul ne peut douter qu'il dirige à Moscou, est un nostalgique de l'URSS. Ne proclama-t-il pas, dès son entrée en fonctions, à la fin des années 1990, que la chute du système soviétique avait été la pire catastrophe jamais arrivée à la Russie ? Ce n'est pas l'Union soviétique en stagnation de l'époque de Brejnev que regrette Poutine mais celle triomphante et criminogène de Staline.

Les historiens russes ont pour devoir, sur ordre du Kremlin, de réhabiliter le dictateur, d'en faire un héros de la nation. Ajoutons qu'aucun dirigeant actuel n'a cru bon, jusqu'à présent, d'exprimer la moindre repentance pour ce passé. Au contraire, Poutine et les hommes en uniforme qui l'entourent se réclament avec fierté de la tradition tchékiste, du nom de cette police politique connue sous diverses appellations (GPU, NKVD, KGB...) qui fut le bras armé du Parti communiste, l'exécuteur de ses basses oeuvres.

Osons une comparaison hardie mais pertinente. Si au milieu des années 1960, soit deux décennies environ après la défaite du nazisme, l'Allemagne avait été dirigée par des nostalgiques de Hitler, plus grave encore par les héritiers spirituels des SS et de la Gestapo (ce que fut à la fois l'ancien KGB dont sont issus Poutine et son entourage). Imaginons encore que cette Allemagne décide, par exemple, de récupérer les Sudètes. Parlerions-nous avec autant de désinvolture de "frontières naturelles" ?

C'est parce que les Géorgiens n'ont pas oublié ce que fut l'occupation soviétique qu'ils ne veulent surtout pas d'un retour en arrière. De même pour les Moldaves, la Crimée, l'Ukraine (les prochains sur la liste de cette recomposition de l'URSS d'antan ?), sans parler des pays de l'Europe centrale et orientale ni des Baltes, nos compatriotes européens. Tous ces peuples ne sont pas frappés par notre amnésie et craignent la politique impériale de Moscou.

On peut certes évoquer les racines slaves présentes dans certains de ces pays pour légitimer la politique du Kremlin, mais pourquoi alors ne pas laisser aux peuples concernés le choix de décider s'ils souhaitent ou non s'abriter dans le giron moscovite ? Le régime poutinien, qui hait la démocratie, de crainte d'avoir un jour à rendre des comptes à des électeurs libres, n'est guère dans cette logique. La militarocratie au pouvoir au Kremlin conçoit le monde en termes de rapports de forces. Ces tchékistes, orphelins de Staline, ne connaissent pas d'autre culture politique.

Une Russie démocratique ne se serait pas lancée dans cette aventure militaire. Quant au discours qui consiste à interpréter la politique du Kremlin comme une réaction à l'encerclement occidental, à inverser la culpabilité en accusant Washington d'avoir poussé Moscou à réagir, il fait également fi de la nature particulière de ce régime. La diplomatie de nuisance pratiquée par Poutine sur la scène internationale depuis quelques années (chantage au gaz, blocage sur le nucléaire iranien, front commun avec la Chine, armement de la Syrie...) a de quoi susciter la méfiance occidentale. Cette diplomatie s'inscrit dans la logique de la politique menée par le Kremlin à l'intérieur du pays. Un régime qui opprime son peuple représente toujours un danger pour ses voisins. Après avoir muselé les Russes, la militarocratie poutinienne passe à l'offensive à l'extérieur. Et à l'instar de tout régime fort, celui-ci sait jouer du nationalisme pour faire croire à sa légitimité (les JO de Pékin ont fourni sur ce point une démonstration exemplaire).

Entériner le coup de force du Kremlin au nom du fatalisme géopolitique (la prétendue "zone d'influence" de Moscou) est le pire des services à rendre au peuple russe, à la Russie elle-même et à ses voisins. Un Poutine libre de faire ce qu'il veut en Géorgie se sentira encouragé à opprimer davantage encore son peuple et à lorgner sur d'autres prétendus dominions proches. Une blague de l'époque soviétique disait que l'URSS avait des frontières avec qui elle voulait. Ce n'est pas (encore) le cas avec la Russie actuelle mais l'homme fort du Kremlin en rêve sans doute.

Dans cette crise il ne faut pas se tromper d'analyse. La question caucasienne ne consacre pas un retour sur la scène internationale de la puissance russe mais sanctionne plutôt l'extrême difficulté qu'éprouve ce pays à sortir du communisme faute d'avoir su et voulu, jusqu'à présent, regarder son terrible passé en face. Au-delà des logiques d'Etat, il y a dans la situation présente une dimension morale essentielle qui devrait conforter nos démocraties dans leur bon droit par rapport à un adversaire (n'ayons pas peur du mot) qui aimerait bien imposer son ordre en Europe après avoir réussi à le faire chez lui, en s'inspirant d'une histoire condamnée par le sens commun.

"Nous semblons avoir tout oublié". "Une forme de négationnisme". Indeed, this is proven all too well, once again, by the tasteless and gutless comments of Le Monde readers willing (and how!) to suck up to Moscow: comments that explain that Russians today are persecuted, and that notably the Russians of 2008 were/are the victims because… Stalin and Beria — who are compared to American (!) gangsters! — were Georgian!!

  • l'URSS ? Parlons-en ! Staline et son tortionnaire n°1 Béria (et sa bande de voyous dignes d'Al Capone) étaient GEORGIENS, non Russes.
  • Le soi-disant héritage soviétique est dans la continuité du pouvoir des tsars ... y compris d'Anne de Kiev, tsarine de Russie. Quant aux Géorgiens Staline et Beria, ce sont les Russes qui les ont subis. Wolton oublit de nous dire que la Crimée n'a jamais été ukrainienne sauf depuis Kroutchev, que les Russophones sont persécutés dans pas mal de républiques ex-soviétiques
  • Les russes n'ont pas le gène de la terreur, cet article est réducteur et partial. A tout pouvoir il faut un contre pouvoir.Si les Russes se relèvent, tant mieux pour eux. On peut juste espérer que ça incitera les ricains à faire gaffe à leur stratégie internationale.(peu probable). Rien de neuf en fait. Le passage de l'URSS et de la chine à une économie de marché est peut-être la pire chose qui soit arrivée aux USA. A suivre
Where many Le Monde readers seem to be outraged by the comparison between Germany's Nazis and Russia's Commies — how dare anybody stoop so low?! — Rutgers University Professor of political science Alexander J. Motyl has this to say in the International Herald Tribune:
Russia's blitzkrieg against Georgia has taken place 70 years after the infamous Munich Agreement of September 29, 1938, when France, Britain and Italy agreed to cede Czechoslovakia's Sudetenland to Nazi Germany in the hope of establishing "peace in our time."

Like Hitler's Germany, Vladimir Putin's Russia is a post-imperial authoritarian state that must expand. The Soviet empire's collapse in 1991 left the Russian population feeling humiliated; economic collapse in the early 1990s only compounded their demoralization. As in Germany, Russians blamed democracy for their collapse and humiliation. And, as in Germany, a strongman promising greatness and glory seized power, dismantled democracy, and created an authoritarian, hyper-nationalist regime with a personality cult based on promises to re-establish imperial greatness.

The war against Georgia is not the first instance of Russia's aggressiveness vis-à-vis its former colonies. Estonia was the target of a cyberwar; Latvia, Lithuania, Belarus, Ukraine and the Czech Republic have been subjected to energy cut-offs; Georgia, Moldova and Ukraine have been punished by trade sanctions.

These states, like all of Russia's non-Russian neighbors, know that the war in Georgia is really about them.

The Munich Agreement is considered a classic example of the perils of appeasement. Had the democracies said no then, it's possible that World War II could have been averted. At some point — and that point surely arrived with Russia's invasion of Georgia — the West must learn to say no to Russia. Expelling Russia from the G-8 would be symbolically nice, but Putin would respond with a laugh. Only an "anti-Munich" would say no in a meaningful fashion: Admit Ukraine and Georgia into NATO's Membership Action Plan — immediately. Putin will glare in response; he will threaten retaliation — and then, like all loud-mouthed dictators, he will acquiesce.

2008/09/09

Louanges pour "l'amour [!] des Ossètes et des Abkhazes qui…animent" les Russes : Un article mettant en doute Moscou est fustigé par les lecteurs de LM

Toutefois, si, dans un cas comme dans l'autre, les décisions n'ont pas été approuvées par une instance internationale qui aurait pu leur conférer une forme de légitimité, en l'occurrence le Conseil de sécurité de l'ONU, l'assimilation des deux ne résiste pas à l'examen. Aussi bien en ce qui concerne l'avant-guerre, la guerre elle-même et l'après-guerre, les situations au Kosovo et dans le Caucase sont différentes.

…Les frappes de l'OTAN sur le Kosovo et la Serbie, à partir de mars 1999, ne sont pas la décision unilatérale d'une puissance soucieuse de reconstituer son glacis, mais le résultat d'un long processus international. Le tournant a été, en février 1999, l'échec des négociations de Rambouillet et le refus du président serbe, Slobodan Milosevic, de se conformer aux décisions de l'ONU. On ne constate rien de tel dans la démarche de la Russie, qui, considérant le Caucase comme sa chasse gardée, rejette toute intervention des Nations unies et pratique depuis plusieurs années une politique d'annexion de facto des régions séparatistes de la Géorgie. Ce qui est vrai pour l'avant-guerre et la guerre elle-même l'est aussi pour l'après-guerre. …

Moscou ne voulait pas négocier. Dans ces conditions, il est difficile d'assimiler le processus d'indépendance du Kosovo géré dans les enceintes internationales après d'interminables débats au fait accompli en Abkhazie et en Ossétie du Sud, à la suite d'une guerre éclair de six jours et d'une décision unilatérale de la Russie prise en deux jours.

… Le parallèle entre le Kosovo et le Caucase est révélateur de deux conceptions opposées du système international. Du côté des Occidentaux, la tentative maladroite, parfois hypocrite, d'accommoder une évolution du droit international pour dépasser la contradiction entre, d'une part, le principe de la souveraineté nationale et de l'intégrité territoriale, et, d'autre part, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. … Du côté de la Russie, on a une politique de puissance misant sur la création de faits accomplis. Vladimir Poutine se situe dans la pure tradition de l'URSS.
Using precise examples as well as common sense, Daniel Vernet debunks Russia's alleged parallels between Georgia and Kosovo (albeit naturally with hemming and hawing and in nowhere the same castigating language as with any crisis that America is — directly or otherwise — involved in), only to have the vast majority of Le Monde's readership erupt in accusations of the newspaper's "anti-Russianness" blinding them from seeing attempts to prevent Russia from becoming an energy superpower as well as America's hand at play, coupled with a defense of the Russians' "love [!] for the Ossetians and the Abkhazis" and a desire for "la possibilité pour l'Ossétie et l'Abkhasie de sortir de la menace permanente du nationalisme géorgien". What the "Munich-spirited" readers are doing, in effect (as a couple of rare readers point out), involves "rewriting the recent history of the Balkans" while "ignoring Russia's total unilateralism".
Curieuses réactions des lecteurs... Certains réécrivent l'histoire récente des Balkans, oubliant que seule la politique nationaliste pan serbe de Milosevic a provoqué le chaos. D'autres absolvent l'impérialisme russe, soudain réduit à une réaction de "peur" face à "l'offensive" de l'OTAN. Louer les nationalismes archaïques, dénigrer l'occident contre toute évidence historique, flétrir les américains en toute occasion, ces réactions ne donnent pas tort à M. Vernet. Elles sont l'esprit munichois.
It must be the same readership that extols the Russian flag flying over Sebastopol, with words such as "the Ukrainians" showing themselves "incapable of a constructive dialogue"!

It is not the first time that Le Monde readers have shared their oh-so-lucid thoughts on Georgia (or any other matter) with the blogosphere…

2008/09/04

Les Estoniens devraient écouter leurs voisins et se demander s'ils sont plus proches de l'UE que ne l'est la Géorgie

Dans une interview avec Olivier Truc dans Le Monde, le président estonien, Toomas Hendrik Ilves,
appelle les autres pays à repenser radicalement leur approche de la Russie. "La théorie post-1991 du nouvel ordre mondial, après l'effondrement de l'URSS, selon laquelle la Russie n'envahirait plus, est désormais obsolète, déclare-t-il au Monde. L'hypothèse fondamentale de toute l'architecture de la sécurité européenne depuis 1991 a été changée. Nous devons complètement repenser l'idée même de sécurité en Europe. Cela prendra des mois, voire des années."

Il sait, par expérience, qu'avec la Russie, les choses ne changent que si la Russie elle-même le décide. Aussi, discuter de punition ne l'intéresse pas actuellement. Cela ne ferait que glisser sur la carapace russe. "Nous avons affaire à une Russie agressive, poursuit-il. Voyez, par exemple, (le président russe Dmitri) Medvedev sermonner le président moldave (Vladimir) Voronine à propos d'une autre de ces régions mafieuses qu'est la Transnistrie. C'est un retour à la loi de la jungle, quelque chose entre le comportement de l'empire britannique du XIXe siècle et le gangsta rap : c'est à cela que cela me fait penser.

…Quand on lui demande s'il craint que la Russie prenne le prétexte de venir en aide à l'importante minorité russophone qui vit en Estonie (environ un tiers de la population, comme dans la Lettonie voisine) pour interférer dans les affaires du pays, ainsi que l'a suggéré le député européen estonien Tunne Kelam, M. Ilves est tout aussi catégorique. "On ne fait rien aux Russes d'Estonie qui pourrait entraîner une telle réaction, répond-il. Et la dernière fois que cet argument a été utilisé, c'était par Milosevic, et avant par Hitler. Quand on évoque ce genre d'arguments, on ne parle pas de l'Europe civilisée."

La principale erreur, selon lui, a été commise lors du sommet de l'OTAN à Bucarest, en avril, quand la Géorgie et l'Ukraine se sont vu refuser l'accès au Plan d'action pour l'adhésion (MAP) à l'OTAN, notamment sur le blocage de l'Allemagne et de la France. "Je crois qu'il est assez évident que ce refus a été interprété par la Russie comme un feu vert pour faire ce qu'elle voulait en Géorgie", dit-il.

Ce qui l'inquiète, aujourd'hui, c'est la réaction de certains hommes politiques européens qui disent craindre la formation d'une "coalition anti-Russie" au sein de l'UE. "Je dois dire que je suis plus inquiet de la formation d'une "coalition pro-Russie" qui place ses intérêts financiers au-dessus des valeurs fondamentales de l'Europe", conclut-il.

And yet, those ever-more-lucid-than-everybody-else Le Monde readers are back in the comments section. If they are representative of French citizens as a whole, then what is denounced in France over and over and over and over again is… American imperialism and the American… "gangster nation":
il faut être bien naïf pour croire que les bases et les flottes de guerre (hors des USA), l'OTAN, les coups d'Etat de la CIA ne servent pas d'abord et avant tout les intérêts de l'impérialisme US, y compris en Europe. L'invasion de l'Irak, incomparablement plus injustifiée et barbare que celle de la Russie vous satisfait-elle? Seriez vous de ceux qui pronent la guerre et le colonialisme tant que cela profite aux "Occidentaux"? Peu vous importe que cela soit dû au gangster US?
There is more about America's occupation of Europe and America's threats towards Russia (with "their agent, Yeltsin")
Les USA occupent l'Europe depuis 1945 (bases, présidents soumis), et auraient dû s'en retirer au moins en 1991, car sans plus de pretexte "soviétique" (d'autant que leur agent Eltsine détruisait la Russie). A contrario les USA en ont profité pour occuper de plus en plus de pays et menacer la Russie à sa frontière (pays baltes, Pologne, Géorgie). Alors que les dirigeants européens veulent rester soumis aux USA, la Russie le refuse. Les européens libres devraient prendre exemple de la Russie.
You read that right: the Baltics, Poland, and Georgia are occupied by the Americans while "free [sic] Europeans" should look to Russia as an example! Better yet! Finland (and finlandization) are subject to praise (!?!!)
Avec des dirigeants nés à l'Etranger, éduqués aux Etats-Unis et formés à la propagande anti-communiste, on comprend que les relations se détériorent avec le voisin russe : le prisme idéologique n'a jamais fait bon ménage avec le pragmatisme ! Ces pays jouent avec le feu et ce n'est pas l'OTAN qui les préservera d'une révolte intérieure de leur minorité russe qui se plaint depuis longtemps d'être des citoyens de seconde zone !Pourquoi personne ne s'inspire de la sage Finlande ?
If Europe does not have a European army, whose fault is it? Nato's — of course! (Which is also "[le] véritable agresseur en l'espèce")
N'est-ce pas à cause de l'Otan que nous n'avons pas une armée européenne digne de ce nom ? L'otan, dans ce glacis, est plus ou moins incapable de servir la paix (n'est-ce pas, quand-m^me, ce à quoi nous aspirons ?), les américains ayant des vues mercantiles sur la région, et les russes ne voulant pas se faire tondre la laine sur le dos. Ah, c'est sûr, il faut montrer ses muscles devant Poutine, pour être crédible, mais tant qu'on comptera sur l'ami américain pour régler nos prob
In fact, why isn't Estonia's President — and therefore this article — credible in the first place? Because Toomas Hendrik Ilves is intractably linked to big, bad, treacherous America!
Cet ancien journaliste de Radio Free Europe, né en exil en Suède et éduqué aux Etats-Unis...Tout est dit dans cette petite phrase ! les Européens convaincus n'ont que faire des "petits conseils "de ce pas trés "honorable" correspondant
In any case, there is hardly reason to be distrustful of the Russians, since "one cannot see Moscow's interests in taking over those territories". Big bad America's interests, on the other hand, that's another story: those interests can be seen everywhere…
Les inquiétudes des baltes sont pour le moins compréhensibles, pour ne pas dire légitimes (encore qu'on ne voit pas quel intérêt Moscou aurait à remettre la main sur ces territoires).
Indeed: Poor Russians!
Pourquoi les Baltes, la Georgie, L'Ukraine dans l'Otan ? Depuis leur accession à l'Indépendance ces pays sont en ébullition perpétuelle! L'Ukraine brime Russes et Uniates ! La Georgie assistée de barbouzes états-uniennes opprime les Ossètes, Abkhazes, et Adjares ! L'Ukraine, la Pologne, les Pays balte sont souvent dirigés par des émigrés élèves des Universités EU qui n'ont rien appris ni rien oublié ! L'Ouest a tourné la page avec l’Allemagne, l'Est doit en faire autant avec la Russie.
Meanwhile, Hubert Védrine has these stirring and courageous words to say in Le Monde — namely that Russia's reaction is normal, as Moscow is a victim of faits accomplis:
"Nous sommes dans une situation d'interdépendance", estime M. Védrine, qui ne permet pas à l'UE de suivre la ligne dure préconisée par les pays baltes, en appliquant des sanctions ou en envoyant des troupes de maintien de la paix :

Pour l'ancien chef de la diplomatie française, ce conflit doit être l'occasion pour l'Occident de repenser sa politique russe. "Les Occidentaux se sont fait des illusions quand ils ont cru que l'histoire était finie après la fin de l'Union soviétique, explique-t-il, quelqu'un d'aussi pondéré que Michael Gorbatchev n'a cessé de répéter que la Russie était toujours placée devant des faits accomplis : l'élargissement de l'OTAN, le développement du bouclier antimissile américain, l'indépendance du Kosovo... Ce n'est pas étonnant qu'à un moment ou à un autre, il y ait une réaction. Même si elle est brutale et disproportionnée."
One interesting comment, though, is the one in which one (lone) Le Monde reader is so stunned by the ubiquitous pro-Russia comments that he cannot but wonder if the newspaper's comments section hasn't been taken over by the KGB:
Ce qui me frappe dans les réactions d'abonnés aux articles sur l'invasion de la Géorgie par la Russie, c'est le nombre de partisans de la Russie. La pauvreté des arguments, réprise plate de la propagande russe, et leur agressivité anti-américaine font que je me demande s'il ne s'agit pas de trolls du KGB. Les Russes ont déjà montré de quoi ils sont capables en matière d'attaques Internet et ça me paraît plausible que Moscou essaie de vendre ainsi sa salade sur les sites de journaux occidentaux.
If Antoine B read La Bannière Étalée, he would learn things such as the comment by Stanislas Sorokine, a KGB colonel during the Cold War:
Il n'était pas trop difficile de trouver des Français qui, sans avoir le sentiment d'espionner au profit de l'URSS, étaient disposés à une collaboration contre un ennemi commun : les Etats-Unis. C'était après tout la ligne officielle de votre gouvernement à l'époque.
A question to ask oneself (whether one is French or American or Estonian or Russian or another nationality): Has that French line, official or otherwise, ever changed?

2008/09/01

Les soldats français savent que pour réussir une mission de paix, il faut parfois mener des opérations de guerre

Évoquant les "dix soldats français … morts en Afghanistan", Bernard Kouchner and Hervé Morin écrivent dans Le Monde qu'
ils savaient que pour réussir une mission de paix, il faut parfois mener des opérations de guerre.
While the foreign and defense ministers speak well, though, Le Monde readers and pundits seem to reject their viewpoint en masse (to put it diplomatically), Collège de France professor Gérard Fussman seemingly seeing some sort of monkey business in the fact that when they were killed, the French troops were protecting the flank of America's Begram base (Fussman adds that "les troupes de l'OTAN sont dans une situation pire que les troupes soviétiques") and numerous Le Monde readers (i.e., numerous French citizens) preferring to evoke American folly, American treachery, American plots, and "the American Big Brother".

The home front: "An ocean of cowardice"?

One commentator compares the government ministers' opinion piece to the pronouncements of Nazi Germany and/or Vichy France ("de la propagande de masse du même type que celle des années 1940 à 1944"), "La France n'a rien à faire dans cette galère" says another, "SOLDATS RENTREZ CHEZ VOUS CETTE GUERRE N'EST PAS LA NOTRE!" yells yet another, "l'éconiomie américaine est basée sur la guerre et nous, on suit" deplores a fourth, "Pourquoi ne parlent-ils pas du pipe line vers l'océan indien ????" asks a fifth, "l'Otan est l'invention des usa" charges a sixth (who respects all proper names' respective capital letters in his comment except… — for Uncle Sam's), "c'est une véritable dictature militaire US qui se cache derrière l'Otan et ses têtes de pont aux portes de la Russie" reveals a seventh (who adds that he hopes that Beijing will help bring America down — "Reste à espérer leur effondrement financier via la Chine et l'"himalaya" que représente les bons du trésor US"), as another evokes — I kid you not — the Russians as victims (!) of a plot masterminded by Bush ("torturés de voir comment on traite les russes victimes d'un complot ourdit par Bush") and a ninth evokes a future betrayal of NATO ("si demain il faut trahir l'OTAN ou l'Europe") while a tenth describes the war of the 1980s as pitting the Taliban terrorists, "amis des USA (qui les ont formés, armés, reçus à la Maison Blanche)", against (note the positive descriptives throughout the short phrase) "le régime laïc soutenu par l'URSS" (all-the while calling the 9-11 attacks a "preemptive attack by Bin Laden" (!!) — "probablement une attaque préventive de Bin Laden"), an eleventh quotes …Robespierre (!), and a clueless loser claims that it is the French "[qui] faisons le sale boulot pour les Americains" adding (just in case you were wondering), "ce qui rend le sacrifice de nos momes encore plus triste".

Meanwhile, one loner, fg, attempts to set things straight by putting the word "Mômes" (kids) for soldiers into perspective and by evoking "an ocean of cowardice" where "it is easier to throw up all over the Americans":
On s'engage au RPIMA [Régiment de Parachutistes d'Infanterie de Marine] quand [on] est prêt, s'il le faut, à mourir en héros pour la France. C'est ce qu'ont fait ces 10 militaires. Au cours de l'Histoire, ce sont parfois quelques uns de ces hommes qui, plongés dans un océan de lâcheté, ont sauvé l'honneur. En d'autres temps, j'aurais préféré ne pas avoir à compter sur ceux qui refusent de voir le nouveau fascisme djihadiste pour ce qu'il est, sous prétexte que l'Afghanistan est loin et parce que c'est plus facile de vomir sur les américains.

2008/08/11

"Bravo" — "L'anti-américanisme obsessionnel" des "Munichois" sur la guerre en Géorgie : "Les Russes ont bien réagi" et "Nous sommes tous des Russes"

Des combats, la guerre (cf. en Irak), impliquent des troupes américaines ? On accuse les Américains, on les accuse d'être des criminels — et ce en lançant des bordées innombrables remplies de critique, de ridicule, de mépris, et de bile.

Des combats, la guerre (dans le Caucase), impliquent des troupes non-américaines (en l'occurrence, russes) : On accuse… les Américains (!) on les accuse d'être des criminels — tout en déplorant la Russie (!), pauvre victime (!) de la Géorgie néfaste…

Comme avec le Rwanda, on s'aperçoit que la prétendue amour de la paix des Français (lucides à souhait), n'est qu'un leurre pour cacher leur antiaméricanisme. Voir seulement les innombrables réactions aux combats en Ossétie du Sud, qui vont du "oui… mais" au (carrément) Bravos pour… la Russie ! (Un lecteur exhorte même les bombardiers russes — comme si l'armée russe était l'incarnation de la liberté et de la libération (!) — de "ne pas rater" les statues d'un certain Géorgien, comme si les crimes de "l'enfant du pays, un Géorgien sanguinaire nommé … Staline" était entièrement imputable au pays qu'est la Géorgie et aucunement au Kremlin (ou il sévit comme maître, après tout) et à la Russie.)

"Les Russes ont bien réagi. Bravo." Merci pour cette précision. Cette réaction, comme nombre d'autres, confirme bien que le pacifisme français vanté au plus haut n'est en fait que de l'antiaméricanisme. Des soldats américains participent à une intervention militaire, on se sert des discours humanistes comme arme pour fustiger les USA.

Des soldats non-américains (cf russes) participent à une intervention militaire, et là, c'est, ah il faut les "comprendre" — voire …les soutenir. L'antiaméricanisme a de beaux jours devant lui — tout comme l'hypocrisie française. Voici d'autres réactions, malheureusement typiques, de lecteurs…
Si quelqu'un fait le mort, M. (ou Mme) "A quand une armée européenne?", c'est bien les Européens — comme le montre la vaste majorité des réactions sur ces pages!

À tous ceux qui disent "Les Russes ne sont pas des anges mais là on a poussé à bout ses dirigeants. Washington pousse au crime" (!) : Je suggère que vous alliez essayer de partir à Prague, à Varsovie, à Vilnius (sans parler de Tbilisi) et y tenir ces paroles.

Ah? C'est vrai? Ce sont les pays qui (comme dirait Chirac) "feraient mieux de se taire" ?! Avec une telle attitude méprisante — couplé avec le mépris pour les USA —, qu'on ne s'étonne pas que les Européens de l'Est — et les Caucasiens — tiennent à leurs liens avec Washington.

Justement : parmi les (rares) réactions avec un peu de sens commun, il y a celui de LoR :
On se croirait revenu aux temps de l'Allemagne nazie. Quand on laissa Hitler envahir les Sudètes puis l'ensemble de la Tchécoslovaquie. L'UE continuera-t-elle longtemps à observer une invasion en règle d'un Etat par un autre sans réagir militairement. Il est fort à parier que quand la Moldavie tentera de récupérer sa province séparatiste de Transnistrie, l'UE observera sans broncher l'armée russe envahir voire annexer la Moldavie. Décidément, nous sommes gouvernés par des "munichois" !!
"Où sont nos droits de l'hommistes professionnels" demande, quant à lui, Jean-Louis C ; "quel silence. quelle honte de ne voir personne s'élever contre le retour de la russie aux pires heures du stalinisme sous la houlette du dictateur poutine."

gmt ajoute :
Saakashvili n'est pas un tendre, les Occidentaux ne jouent pas un jeu innocent, d'accord. La mort d'innocents est inacceptable. Mais regardons les responsabilités en face. La Russie, qui hurle contre toute indépendance de la Tchétchénie, se cache à peine de soutenir les séparatismes abkhaze et sud-ossète. Si l'argument de stabilité est valable d'un côté, il l'est de l'autre. L'hypocrisie et l'arrogance du Kremlin dans cette affaire dépassent, et de loin, celles des Occidentaux ou de Tbilissi !
Surtout, gmt conclut ainsi :
Hallucinants, les dérapages verbaux de certains ! Combien de pays faudra-t-il sacrifier avant que ces gens ne comprennent que leur anti-américanisme obsessionnel ne les autorise pas à orienter le sort des millions de gens qui, eux, vivent dans ces pays ? Cet égocentrisme à bonne conscience est décidément révoltant !